La commune de LEBETAIN, et particulièrement son massif forestier, subit les méfaits de l’évolution climatique liés au réchauffement. Toutes les parcelles boisées sont concernées.
Les périodes de sécheresse successives ont provoqué un stress hydrique important, aggravé par une montée des températures sur les deux années précédentes. La forêt communale est désavantagée par son implantation sur un plateau calcaire, précipitant le manque d’eau.
En 2018, nous constatons des anomalies sur l’évolution des hêtres, notamment l’absence de feuille sur les extrémités des branches (les cinquante derniers centimètres). Autre élément inquiétant, à travers les houppiers nous apercevons le ciel. Ce fait est caractérisé par un développement foliaire anormal (Feuilles beaucoup plus petites), de plus certains arbres présentent des suintements et décollement d’écorce liés aux attaques de scolytes :
Au printemps 2019, nos doutes sont confirmés, avec une accélération du dépérissement des hêtres. Le stress hydrique s’est amplifié, provoquant l’assèchement de la partie supérieure, fragilisant l’arbre qui se brise au coup de vent au départ des branches maîtresses :
Une inspection de la forêt permet d’établir un bilan catastrophique : 250 hêtres d’un diamètre à hauteur d’homme de plus de 40 centimètres sont en situation critique, nécessitant leur exploitation. Beaucoup d’autres hêtres présentent des signes sanitaires du même ordre. La commune a pris la décision avec le concours de l’ONF d’exploiter les premiers, représentant deux années de coupe. Cette décision s’imposait pour deux raisons :
- Mise en sécurité des routes et chemins forestiers liée aux ruptures de branches sèches.
- Valoriser les bois, vu la dépréciation rapide du hêtre. Beaucoup d’arbres présentent des signes de vieillissement rendant le bois non commercialisable :
La réaction précoce de la commune a permis de procéder aux coupes et ventes en décembre 2019. L’ensemble des bois doit être exploité courant 2020 : affouage, bois d’œuvre, bois industrie, bois énergie.
Malheureusement, d’autres essences forestières sont concernées dans ce schéma dramatique :
- Le frêne présente une attaque par un champignon pathogènes (Chalara fraxinea) provoquant une maladie fongique, la chalarose, détruisant les racines. A LEBETAIN, vous pouvez voir en forêt ces arbres au sol, quelque soit leur diamètre. Aucun traitement pour cette maladie. Quelques arbres résistent, mais grand danger pour l’essence.
Le charme, au même titre que le hêtre, sèche sur pied.
- En 2019, nous constatons que certains chênes laissent passer la lumière dans le houppier en raison de feuille plus petites.
- Nos résineux commencent également à présenter des signes alarmants : Apparition du bostryche ou scolyte :
SCOLYTE : Ce petit coléoptère se reproduit sous l’écorce des épicéas, où les larves creusent des galeries empêchant la circulation de la sève. L’arbre perd son écorce, sèche sur pied et prend une couleur rousse. La sécheresse actuelle fragilise l’arbre qui ne peut se défendre.
Deux types de scolyte :
– scolyte typographe de 5 mm de long qui s’attaque aux arbres adultes
– scolyte calcographe de 1,3 mm qui s’attaque aux jeunes plans, mais peut sévir avec le typographe sur les mêmes arbres dans les parties supérieures et les branches.
Le bostryche typographe (Ips typographus) est une espèce d’insectes coléoptères de la famille des Curculionidae, de la sous-famille des Scolytinae, originaire d’Eurasie. C’est un petit coléoptère ligniforme ravageur des forêts d’épicéas. Il a un corps cylindrique allongé avec des élytres et sa couleur est brun rouge.
Différentes espèces :
Les forêts résineuses rassemblent, sur une même surface, une masse d’arbres, le plus souvent d’une espèce unique qui sont, lorsqu’ils vivent dans des conditions difficiles (sécheresse par exemple), les victimes désignées pour l’attaque d’insectes nuisibles : les « BOSTRYCHES » Il en existe de nombreuses espèces, vivant- soit entre l’écorce et le bois, soit dans le bois. Ce sont les premiers qui accélèrent le dépérissement et provoquent la mort des arbres déjà en conditions difficiles. Certains sont communs à plusieurs essences, mais chaque espèce d’arbre a aussi des parasites qui lui sont propres et dont le dessin des galeries, à la face interne des écorces, est caractéristique.
Le facteur climatique ne se limite pas à la sécheresse, les coups de vent puissants du mois de janvier et février 2020 ont aggravé la destruction de notre forêt, et cette fois en mettant à terre des arbres sains, dont :
- 15 hêtres
- 3 chênes, dont celui-ci, diamètre 1 mètre à hauteur d’homme, l’un des plus beau de notre forêt.
- Environ 70 sapins
- Une quinzaine de frênes de différents diamètres.
L’état sanitaire de notre patrimoine forestier est en grand danger, cependant des signes positifs sont à noter sur l’ensemble des parcelles :
- Le hêtre, le chêne et le charme connaissent une régénération naturelle importante.
- Le frêne ne résiste pas à la chalarose, mais des arbres anciens semblent résister (survivront-ils), de jeunes plans poussent !!!
- Les autres essences (érable, merisier, tilleul) sont en bonne santé.
Notre plantation de chênes (Année 90) à la Grande Ragie (A l’arrière de la maison isolée route de Fêche l’Eglise) évolue favorablement après deux interventions de nettoyage par des affouagistes locaux. Il en est de même dans la jeune hêtraie, parcelle située en face de celle de chêne, côté gauche de la route. Un nettoyage vient d’être effectué sur 2018 et 2019 par des affouagistes de LEBETAIN. Un travail remarquable a été réalisé, permettant de retirer les bois sans avenir :
Au mois de février 2020, et dans le cadre de nouvelles mesures face au réchauffement, avec le concours du Département, des Communes Forestières et de l’ONF, à titre expérimental, une plantation (Ilot d’avenir) de 550 cèdres de l’atlas a été réalisée sur 0,5 hectare dans la parcelle 4, de la Vie de Porrentruy (parcelle coté Suisse). Le choix de la surface est lié à une trouée de la tempête de 1999 (Ouragan Lothar), dont la régénération naturelle s’est mal réalisée, et propice à des cépées de noisetiers et de frênes dépérissant.
Pourquoi le choix du cèdre de l’atlas :
Essence moins sensible à la sécheresse, elle :
- peut supporter 2 à 4 mois secs,
- montrer une productivité intéressante,
- donner des individus bien conformés et un bois de qualité, durable.
Enfin, le cèdre de l’Atlas est apprécié pour son intérêt paysager et pour le moment indemne de problème sanitaire grave.
Le cèdre tolère une grande variation de température (entre 7,5 et 15°C de température moyenne annuelle avec une moyenne des minimales du mois le plus froid comprises entre 1°C et – 8°C et du mois le plus chaud pouvant aller jusqu’à + 41°C. Il ne peut subsister en dormance en dessous de – 25°C. De ce fait, dans le massif du Jura on considère qu’il ne peut être introduit au-dessus de 700 m.
Essence tolérante à la sécheresse du fait de sa capacité à puiser l’eau en profondeur via son système racinaire. Il est capable d’infiltrer ses racines dans les fissures des roches en place. Peut réagir à la sécheresse en interrompant sa croissance en longueur ou en diminuant la taille de ses aiguilles, donc évapotranspiration. Il est très sensible à l’aération du sol et valorise mieux que d’autres les sols caillouteux.
Est-ce que la nature s’adaptera à ces nouvelles conditions ?
Texte et photos de Guy Niederhoffer, adjoint au maire de Lebetain, chargé de la forêt
Ci-dessous le document fourni par Guy :